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Interview de Michel Voletti pour la création de la pièce "1,2,3 Soleil " de Cristelle George et mise en scène par Michel Voletti.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

S.B: Bonjour Michel ! Merci d'accorder cette interview pour nos lecteurs de "L'Onde Bleue: Regards et Créations  ".  Tu es un acteur complet jouant dans tous les registres depuis toujours et dont le parcours est autant sur les planches que sur les écrans de cinéma en Europe ou aux États Unis .Peux-tu nous parler un peu de l'origine de ta passion pour le théâtre et de ce passage du rôle de comédien à celui de metteur en scène?

 

M.V : Bonjour Safia. A l’origine, je voulais être chanteur. Mais mes parents, ma mère surtout, ne voulaient pas en entendre parler. Comme pour beaucoup de parents, il faut avoir un VRAI métier ! J’ai commencé à Nice, pendant mes études en rejoignant la MJC. Incarner un personnage me permettait de ne plus être moi, de m’évader. Je trouvais ça génial ! Cependant, je ne pensais pas devenir acteur. C’est lors d’un voyage aux Etats Unis que j’ai fait mes premiers pas avec des professionnels. J’avais été engagé pour faire les lumières des chanteurs qui passaient au Hyatt d’Atlanta. J’ai même éclairé Samy Davis Jr ! En tant que français, j’avais la cote. Je me suis retrouvé à faire des défilés de mode et lors d’un de ces défilés, j’ai rencontré Andy Warhol qui m’a demandé si je voulais bien faire partie d’un de ses films ! Je n’avais jamais entendu parler de lui mais comme j’étais dans une phase d’ouverture et de découvertes, pourquoi pas ? Je n’ai jamais vu le résultat.

 

Un mois plus tard je revenais en France pour faire mon service militaire… Mais le ver était dans la pomme ! Je ne savais pas ce que j’allais faire dans ma vie, mais je savais ce que je ne voulais pas : travailler ! Comme à Atlanta, je voulais vivre d’aventures et m’amuser ! Pendant mon service à Camp Juers (à côté de Saint Tropez), j’ai rencontré François Florent qui allait ouvrir un cours d’Art Dramatique. Il m’a proposé de venir à Paris pour m’apprendre le métier d’acteur. Je n’avais pas d’argent, il m’a dit « tu aideras ma femme pour la compta ». Je me suis dit que je pouvais toujours essayer et ça fait plus de 40 ans que je fais ce métier et que je m’amuse !

En ce qui concerne la mise en scène, j’avais aussi commencé à la MJC de Nice avec "Huis Clos" de Sartre. C’est une facette du métier qui a toujours accompagné mon chemin d’acteur et qui m’a permis de me faire connaitre quand je suis arrivé à Paris. J’aime énormément diriger les acteurs. Peut-être même plus que de jouer !

 

S.B : Quels sont les souvenirs marquants de ton métier d'acteur?

 

M.V: Il y en a beaucoup ! Ça fait longtemps que je traîne mes guêtres dans ce métier ! (rires) Parmi les plus forts, ma première montée des marches à Cannes pour un film canadien « Justocoeur » de Mary Stephen (pas dans la compétition, mais j’étais un des trois rôles principaux quand même !). Ma famille étant cannoise, y avait de la fierté dans l’air !...Mais aussi les grandes rencontres que j’ai faites aux Etats Unis en tournant avec Francis F.Coppola, Nick Nolte, Richard Dreyfuss, Paul Mazursky, Angela Lansbury, Bruce Willis… Mes master class avec Lee Strasberg et Stella Adler… Eric Rohmer avec « Conte d’Hiver » prix de la critique internationale au festival de Berlin et très bien reçu au Festival de N.Y., ce qui m’a permis d’avoir une photo dans le "New York Times" en trois fois plus gros que celle de De Niro sur la même page ! (rires). La pièce « Playing for time » de Mimi Leder dans laquelle j’étais le Dr Mengele aux côtés de Drew Barrymore qui, dans la journée, tournait dans E.T. ! Un grand moment d’émotion aux côtés de la merveilleuse Marthe Keller dans « Jeanne d’Arc au bûcher » de Claudel/Honegger dirigé par l’immense Kurt Mazur au Métropolitan Opéra de N.Y. et au Philharmonique de Berlin. J’en ai encore des frissons quand j’en parle ! … Les mots de certaines personnes du public venant te remercier d’avoir partagé ce moment avec eux, des courriers… plein de belles choses.

 

S.B : Tu es aussi photographe .Cet art visuel a t-il un lien avec tes périples artistiques qui sont aussi humains? As-tu une exposition en cours ou vas-tu en faire prochainement sachant que l'affiche est par ailleurs inspirée d'un de tes travaux photographiques ?

 

M.V: C’est vrai, c’est une de mes photos qui sert de support à l’affiche de UN DEUX TROIS SOLEIL. Je voulais une affiche différente qui ne fasse pas « théâtre », mais qui intrigue. Cette photo représentait bien pour moi cette route obscure qui mène à la lumière. Et c’est avec l’aide d’un graphiste (Ronan Guennou) que nous avons finalisé l’affiche de la pièce. Mais, photographe est un bien grand mot. Je fais de la photo et après je joue avec pour la transformer en tableau. J’aime créer, j’en ai besoin. La photo me permet de m’évader dans un autre monde où je ne suis face qu’à moi-même. Là aussi, je faisais ça pour la détente, et en voyant mon travail, une amie m’a demandé si je voulais exposer ! Une nouvelle aventure… j’en suis à ma quatrième expo. La dernière était en décembre 2014 à Bruxelles.

 

S.B : Revenons en à ton actualité dramatique de ce mois : tu joues  le rôle de Jean dans la pièce écrite par Cristelle George  "1,2,3…Soleil" dont la première est le 16 septembre prochain dans le beau Théâtre du Ranelagh, mais en plus, tu en es le metteur en scène .Comment ce nouveau projet t'a t-il été inspiré et comment as tu réuni ton équipe artistique et de production pour le mettre en œuvre ?

 

M.V : Cristelle m’avait donné sa pièce à lire il y a quelques années. Elle avait rejoint un tiroir plein d’œuvres en attente. L’année dernière, en faisant du rangement, je l’ai retrouvée. Je l’ai lue et j’ai eu un coup de cœur immédiat. J’aimais la simplicité (apparente) de l’écriture,  il s’en dégageait une émotion intense, les rapports avec les personnages étaient d’une grande justesse et j’ai tout de suite voulu faire quelque chose avec ce texte. On s’est rencontrés, on a parlé et je me suis lancé dans l’aventure. J’ai réuni un cast de rêve autour de ma « vedette » de l’époque Prisca Demarez (qui nous a quittés pour jouer Grizabella dans Cats), j’ai contacté Catherine Develay, la directrice du Ranelagh, pour lui présenter une lecture et, à la fin de celle ci, l’émotion était telle que l’on aurait entendu une mouche voler ! Le sujet étant délicat, il me restait à la persuader de nous prendre. Voilà, c’est fait ! (rires)… Quand Prisca a été prise pour Cats, j’ai fait passer des auditions et parmi les comédiennes vues, Delphine Depardieu est sortie du lot. Elle avait la sensibilité que je cherchais et complétait parfaitement la famille que j’avais créée avec Jérémie Duvall et Marie Tirmont.

 

S.B : Laisser ou non partir une personne en fin de vie, rappelant la loi sur l'euthanasie, est un sujet brûlant d'actualité. La loi encadre le droit de mourir dans la dignité. L'acharnement thérapeutique se fait parfois au détriment du choix du malade et de ses proches au regard du devoir médical qui est de tout faire pour maintenir et préserver la vie. As –tu une position?

 

M.V : Evidemment , il faut encadrer l’euthanasie. Autrement ce serait la porte ouverte à bien des règlements de compte ! Mais je pense que chacun a le droit de mourir dans la dignité. Chacun a le droit de ne pas vouloir souffrir pour rien. On peut parfois apparenter ça à un suicide assisté. Certains pays l’autorisent et assistent les familles, je trouve ça bien. C’est un sujet délicat et difficile à régler. En revanche je suis contre l’acharnement thérapeutique. Heureusement, de plus en plus de médecins accompagnent leurs patients vers la mort.

 

S.B: Dix ans après la promulgation de  la loi Léonetti en avril 2005 , qu'en est-il du droit à la fin de vie du malade  ? Crois tu que cette loi a permis dans les faits une meilleure prise en compte de sa souffrance et donc de son droit de mourir dans la dignité voulu aussi par ses proches? Quel impact sur la position des français face à l'euthanasie?

 

M.V : La loi Léonetti est une bonne chose en soi. Je pense qu’elle évolue dans le bon sens, mais il faudrait qu’elle soit suivie par les politiques, qu’elle ne soit pas barrée par les lobbies catholiques de droite extrême etc. etc. !  

 

S.B : "1,2,3… soleil " est un récit dramatique et intime écrit par Cristelle George, journaliste, auteur et scénariste liant l'histoire de la disparition d'un proche , la mère de Claire, à celle de son retour , des non dits du passé et des rancœurs, de la culpabilité familiale qui restent encore gravés dans les vies de ses membres . En quoi est-ce un sujet qui te touche ? T'es-tu senti un jour dans la situation personnelle d'un des personnages voire dans celui que joue Delphine Depardieu à savoir la sœur aînée Claire qui après avoir fui, revient auprès des siens ?

 

M.V : Résumons  et simplifions le sujet de la pièce : Lassée de fuir, Claire revient chez les siens après douze ans d’absence pour faire face aux non-dits devenus trop lourds à porter. Voilà ! La force de cette pièce est sa grande humanité. Les personnages sont vrais, simples, ils réagissent avec leur cœur.

Christelle George n’a pas écrit une pièce sur l’euthanasie. Elle nous parle de la conséquence des actes, sur soi, mais aussi sur les autres, de la culpabilité de chacun. C’est une histoire qui nous parle de reconstruction, de pardon, d’amour, de beaucoup d’amour. C’est l’histoire d’une famille qui se retrouve et qui va peu à peu s’ouvrir à la lumière. Je pense que c’est un sujet qui va toucher grand nombre d’entre nous.

 

S.B : Vous êtes actuellement en plein filage pour le dernier virage avant la première qui aura lieu le 16 septembre au Théâtre du  Ranelagh.Peux -tu nous parler de la distribution artistique , du casting : suffit-il juste d'être" bon comédien " selon toi pour intégrer le rôle d'un des membres de cette famille ou  faut-il en sus une forme d'empathie et de sincérité dramatique exceptionnelle voire de vécu personnel pour arriver à rendre sur le plateau  la vérité intime et douloureuse de cette famille blessée par la perte d'un être cher? Qu'est ce qu'un bon comédien pour le metteur en scène et acteur que tu es ?

 

M.V : Qu’est-ce qu’un « bon comédien »… Je ne sais pas. Le plus important est la sincérité aussi bien dans le dramatique que dans la comédie. Pour les auditions, la première chose que je disais aux comédiens, c’était « Ne t’inquiète pas, tu as le droit d’être mauvais ». Je préfère quelqu’un de génialement mauvais que quelqu’un de bon. C’est plus intéressant. Après, quel que soit ton rôle, le vécu que tu lui donnes, celui que tu apportes ne peut venir que de toi. Si tu le fabriques, il est faux. Mais tu n’es heureusement pas obligé d’être un ivrogne pour en jouer un. (rires)

 

S.B : Peux -tu évoquer en quelques lignes , ta façon de travailler avec  la troupe, ta manière de diriger pour arriver à cette quasi "mise en vérité" dramatique de tes acteurs ? 

 

M.V : D’abord, je n’aime pas que les comédiens arrivent en ayant appris leur texte par cœur. Je préfère commencer par un travail de recherche des personnages pour voir ce que le comédien apporte dans sa valise. Pour moi, un metteur en scène est là pour guider afin que l’acteur se sente à l’aise dans sa nouvelle peau. C’est lui qui est sur scène, il faut lui donner confiance, qu’il ait du plaisir, qu’il sente que ça vient de lui. Son travail intérieur ne me regarde pas, mais il faut qu’il le fasse. S’il n’y arrive pas, je suis là pour l’aider à trouver son chemin, à l’empêcher de prendre une fausse route. Je pense qu’avec une bonne direction d’acteur, une bonne compréhension de l’humain, on peut amener un acteur très loin.

 

S.B : Quel message délivre la pièce "1,2, 3… Soleil " selon toi ? Cette œuvre peut-elle avoir un effet positif voire cathartique auprès du public ? Ou même pour vous?

 

M.V: Chacun y trouvera le message qu’il veut en venant voir la pièce. Je pense que c’est une pièce positive qui montre que la communication entre les êtres est très importante.

 

S.B : Merci beaucoup pour cette interview Michel Voletti . L'équipe de L'Onde Bleue vous souhaite un plein succès et une très belle première à tous,  à laquelle nous serons présents. On vous retrouvera bientôt pour en parler.

 

Propos reccueillis par Safia Bouadan.

 

 

 

 

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