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Interview de Pascal Amoyel pour sa création "Looking for Beethoven" au Théâtre du Ranelagh


1/ Après avoir créé le spectacle portant sur votre maître Cziffra puis sur Liszt , qu'est ce qui vous a amené à ce nouveau spectacle "Looking for Beethoven"?

Je joue les sonates de Beethoven depuis mon adolescence, elles ont jalonné toute ma vie de pianiste. J’ai toujours éprouvé une fascination particulière pour cette musique qui semble penser, philosopher, qui parle d’une quête de sens du monde.

2/ Quelles ont été les étapes personnelles de travail pour cette réalisation ?

Et comment avez-vous construit votre collaboration avec Christian Fromont qui avait mis en scène vos deux récents spectacles "Le pianiste aux 50 doigts " portant sur la vie et sur l'œuvre György Cziffra et "Le jour où j'ai rencontré Franz Liszt" ?

J’ai d’abord écrit, puis réécrit, puis encore réécrit tout le texte! Ensuite j’ai beaucoup travaillé avec Christian, notamment sur la manière de transmettre ce texte, mais aussi au niveau de la forme du spectacle, condition indispensable pour en rendre compréhensible le fond.

3/ Cela a été comme une révélation pour vous d'entendre cette musique lorsque vous aviez vingt ans, pourquoi ?

À l’époque, j’étais sans doute plus attiré par le répertoire romantique (Chopin, Liszt...). Et puis, alors que je ne m’y attendais pas, une musique résonna un jour dans les enceintes d’un parc. C’est parce que je ne savais pas de qui elle était que je réussi à la goûter, à la « comprendre ». C’est donc en dehors de tout a priori, de jugement, que je pus véritablement l’appréhender. Ce fut une véritable gifle, une véritable leçon de sagesse : c’est dans la non connaissance que l’on peut avoir accès aux choses essentielles, dans l’éternel présent. J’avais appris tant sur Beethoven que je n’arrivais plus à être vide de tout concept. L’idée nous tue, nous rend moins libre, moins disponible.

4/ Que ressentez -vous maintenant en la jouant et surtout en incarnant ce grand compositeur si malheureux dans sa vie et si transcendant dans sa musique touchant l'âme ?

C’est une gageure de jouer 85 fois dans un théâtre comme le Ranelagh. Chaque soir il faut réinventer, continuer à s’émerveiller sans cesse. En quelque sorte je me laisse porter par l’émotion de la redécouverte. À un moment, comme un acteur, c’est un peu comme si j’étais avec lui, comme si j’éprouvais ses propres émotions, et il me sera sans doute difficile de le quitter ensuite.

5/ Si vous deviez délivrer un message à la fin de chacune de vos représentations, quel serait-il ?

Que nous, les hommes, ne sommes qu’Un, et que la musique est un des merveilleux fils conducteurs pour nous le faire réaliser. Au moment de la représentation, artiste et public communient dans une même vibration. C’est un état de grâce merveilleux, et une chance extraordinaire de pouvoir vivre cela, d’être aux premières loges de ce mystère insondable. La vie d’artiste est une vie de sacrifice, de sacerdoce, de travail acharné, mais tout cela en vaut la peine juste pour ces moments…

6/ Vous êtes à l'affiche depuis le 18 septembre au Théâtre du Ranelagh , quels sont les retours du public et quel type de spectateurs vient à la rencontre de votre "Beethoven"? Quelles sont leur impressions ?

C’est un magnifique cadeau de voir que ce spectacle peut rendre accessible un mythe, souvent à tort mis sur un piédestal. J’ai souhaité ramené le compositeur à son humanité première, c’est-à-dire à la nôtre. Le fait que les gens puissent en être touchés, ou me dire qu’il n’écouteront plus jamais Beethoven de la même manière, me comble de joie, et me pousse à continuer à garder chaque soir la même énergie sur scène malgré la fatigue et la répétition.

7/ En tant que professeur au CRR de Rueil, votre recherche artistique et humaine, la découverte de "votre" Beethoven ont-elles un impact sur vos propres élèves et votre pédagogie? De quelle façon ?

Oui bien sûr, après l’enquête intense qui fut la mienne durant trois ans, je vois les choses différemment. Je tente de transmettre ce ressenti à mes élèves. Si l’œuvre de Beethoven relève d’une métaphysique, elle me semble pourtant être moins transcendante qu’immanente, révélant qui nous sommes au plus intime. Il convient donc d’abord de se tourner à l’intérieur de soi. Dès lors le professeur ne doit pas imposer, il ne peut qu’accompagner. Il m’a toujours semblé que répondre à la question « qu’est-ce que la musique » pouvait résumer toutes celles fondamentales que les philosophes se sont posés à travers les siècles : qui sommes-nous, qu’est-ce que la vie, pourquoi sommes-nous là ? Il est impossible d’y répondre avec des mots, qui ne sont que des panneaux indicateurs. Mais la musique, elle, sublime paradoxe, le dit tout en ne disant rien. Elle est au fond plus proche d’une vérité que d’une esthétique. Et cette esthétique, que nous appelons beauté, n’est que la parfum de cette vérité.

Merci pour cette interview-voir aussi notre article .

Propos recueillis par Safia Bouadan

Actuellement à l'affiche :

Lieu: Théâtre le Ranelagh 5 Rue des Vignes 75016 Paris

Réservations :

https://www.theatre-ranelagh.com/fr/saison-2019-2020/looking-for-beethoven

Billetreduc

https://www.billetreduc.com/245060/evtbook.htm?date=1

Distribution artistique

Livret et interprétation :Pascal Amoyel

Mise en scène :Christian Fromont

Photographie de plateau :Philippe Lescalier

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