Portrait interview d’Alice Monicat

SB : Bonjour Alice, parle-nous de ton parcours. Comment en es-tu arrivée à la comédie musicale et à ton aventure de A Cuba Libre ?
Je suis normalienne, récemment diplômée de Sciences Po en Droit Économique. En parallèle de mes études de droit, je montais et participais à des spectacles de comédie musicale étudiants ou amateurs, parfois comme interprète (Moulin Rouge, Hairspray...) parfois comme auteur et metteur en scène (Blues Brothers and Soul Sisters). En 2015, j'entamais mon master de droit à Sciences Po. Je venais d'arriver à Paris et la ville a été touchée par les premiers attentats. L'assassinat de la rédaction de Charlie Hebdo m'a bouleversée et défiler à République n'était pas suffisant. J'ai ressenti le besoin d'écrire ; écrire sur le poids des idées, l'espoir et la haine qu'elles peuvent engendrer. Je pensais écrire pour moi ou pour un nouveau spectacle amateur, puis j'ai rencontré Romain, je lui ai parlé d' «A Cuba Libre» et il m'a convaincue de nous lancer en professionnel.
SB : Pourquoi avoir choisi l’histoire politique de Cuba à cette époque ?
Comme je le disais, je voulais traiter la problématique complexe des luttes idéologiques mondiales et fratricides. Mais je ne voulais pas aborder cette question de manière frontale alors, pour la distancer de notre quotidien, j'ai choisi d'écrire une fiction et de l'inscrire dans un autre lieu, une autre époque... Puis, sans que je sache réellement l'expliquer, Cuba m'a trouvée. Cuba, les années soixante, la Révolution, la guerre froide, la crise des missiles...C’est une période passionnante, pleine de paradoxes, et de surcroît très visuelle. J'écrivais déjà en pensant aux décors, aux costumes et à la mise en scène.
SB : Quel message as-tu souhaité faire passer en réalisant cette comédie musicale ?
Je ne voulais pas faire passer de message. Je voulais exprimer mes doutes, mes craintes, mes espoirs. Tout auteur écrit avec son cœur et il y a probablement une part de moi dans chaque personnage, mais mon objectif était avant tout d'écrire une belle histoire ; une histoire simple, humaine, universelle à laquelle chacun peut donner un sens, son propre sens.
SB : Le tandem que vous formez Romain et toi fonctionne à merveille, comment vous connaissez-vous ?
Aussi étonnant que cela puisse paraître, nous nous sommes connus et rencontrés il y a deux ans pour « À Cuba Libre », sur le parvis de Mogador (il dansait à l'époque sur le Bal des Vampires). Léa Perennes, que je connaissais de Sciences Po, m'a présenté Romain comme potentiel chorégraphe du potentiel spectacle que je voulais monter... Aujourd'hui Romain est chorégraphe mais aussi compositeur et producteur ! Il est devenu mon associé et ami. C'est sans aucun doute une de mes plus belles rencontres professionnelles et humaines sur ce projet.
SB : Ce n’est d’ailleurs pas ta première comédie musicale, entre autre tu as joué dans Hairspray ?
Oui j'ai joué dans quelques spectacles amateurs à Rennes et Paris, comme Hairspray avec la compagnie Hit It en 2015, Moulin Rouge avec l'association Muses & Co à Rennes en 2013... De quoi faire ses premières armes mais rien de comparable avec un spectacle professionnel comme À Cuba Libre.
SB : Quand ont commencé les castings ? Quelle est la distribution des rôles ?
Nous avons fait notre casting au mois de février à Paris. Ont été retenus pour les rôles : Maxime Alvarez de Toledo (Ellis) ; Tatiana Matre (Dalia) ; Sebastien Duchange (Miguel) ; Marianne Millet (Maribel) ; Jaouen Gouevic (José/Pepe) ; Yoann Launay (Boris) ; Magali Bonfils (Sarah) ; Gilles Vajou (Taylor) ; Jonathan Demay (Jefferson) ; Christina Grimandi (la mère)
SB : Qu’est ce qu’ «A tout à l’heure production», dites-nous en plus sur cette structure ?
A tout à l'heure est la société de production que nous avons créée avec Romain pour aller au bout de notre projet tout en conservant notre indépendance artistique. Nous sommes tous les deux associés et j'en suis présidente.
C'est avec cette structure que nous avons monté la soirée du 15 juin au Comedia dans l'objectif de trouver des partenaires de production pour la suite... car suite il y aura, c'est l'objectif !
SB : Ce spectacle est en autoproduction actuellement et vous avez mené une campagne de crowdfunding pour lancer le projet en 2016, je crois ?
Tout à fait, nous avons réalisé une première campagne de crowdfunding à la suite de nos lectures publiques. Nous avons collecté 10 000 euros qui nous ont permis de faire une captation des lectures, d'enregistrer un CD démo des musiques du spectacle et de compléter les financements du showcase, en grande partie autofinancé. Ce n'était pas tous les jours évidents mais, heureusement, des partenaires de production comme Alexandre Piot, l'équipe de Comet Spectacles et de Compote de Prod nous ont rejoints et accompagnés sur le Showcase du 15, pour nous nous aider à lancer le projet.
SB : C’est dans ce but que vous montez un grand showcase au Comédia le 15 juin à 20h avec une première partie d’artistes telle Sarah Manesse et dans ce cadre 1h15 de votre spectacle sera présenté. Quels sont vos autres projets immédiats, un CD, un DVD ...?
Notre projet immédiat pour À Cuba Libre est de lancer la production du spectacle pour la saison 2018/2019 ou 2019/2020, et pour ca nous avons besoin de financements et de partenaires. C’est ce que nous recherchons activement.
SB : Si on veut en connaître plus sur votre comédie musicale et sur votre entreprise ?
Toutes les informations sont sur notre site : www.acubalibre-lemusical.com
Portrait interview d'Emmanuel Suarez
SB : Bonjour Emmanuel, tu es actuellement en création pour la comédie musicale “A Cuba libre” d’Alice Monicat et Romain Rachline. Présente-toi à nos lecteurs. Comment es-tu entré dans l'aventure ?

Je suis comédien depuis longtemps et j'ai travaillé dans le milieu du théâtre, de la télévision et du cinéma. J’ai déjà signé plusieurs mises en scène et codirigé une compagnie puis j’en ai créé une. J’aime beaucoup le théâtre jeune public et le théâtre de texte contemporain.
On m’a aussi commandé plusieurs adaptations de roman comme (en anglais), souvent des romans du XIXe s …
SB : Comment es-tu venu au Théâtre musical et à "A Cuba libre" ?
J’ai eu une compagnie qui faisait aussi du Théâtre scientifique pour les enfants et parallèlement j'ai monté un texte de Jean Luc Lagarce pour lequel j'ai remporté le Prix Théâtre 13 de jeune metteur en scène. A ce moment-là, en 2008, j'ai commencé à faire du théâtre musical. Je suis venu à la comédie musicale presque par hasard grâce à des auditions. Je me suis retrouvé dans les chœurs du Châtelet et j’ai joué dans la création française. Puis j’ai fait pas mal de concerts, de théâtre musical et là j’ai compris que je voulais mettre en scène ce genre. J’ai enseigné par ailleurs le théâtre dans les écoles puis la comédie musicale.
En 2015, j’ai écrit et mis en scène “So in love” au 20e Théâtre où j'ai rencontré Alice qui venait d'arriver à Paris car une des comédiennes avait passé des auditions pour "A Cuba libre" et elle m'a poussé à m’intéresser au projet. J’en ai vraiment adoré l’originalité. Très vite, Alice m’a sollicité pour les aider en vue d'une lecture au Gymnase en mars 2016. J’ai ainsi participé à la mise en espace et en jeu de cette lecture.
Quand Alice et Romain sont passés à une étape professionnelle l’été dernier, ils m’ont alors demandé de continuer l’aventure avec eux. J’aime beaucoup cette idée car j’ai l’impression d’être l’intermédiaire entre leur rêve, leur projet et la concrétisation dans le milieu professionnel au sein duquel ils font leurs premiers pas. Pendant presque un an, j’ai énormément échangé avec Alice, ce qui a fait qu'on a beaucoup construit et fait avancer le projet mais sans être impliqué dans la production et surtout j’ai ramené Raphael Sanchez, directeur musical, compositeur des musiques de scène et arrangeur.
SB : Et pour une autre partie de l'équipe ?
J’ai également entendu la musique de Romain et vu qu'il avait un instinct très sûr. Il fallait donc une personne qui réalise l’orchestration pour l’accompagner. Ce fut pareil pour le décor avec Jean Michel Adam. Toutes ces personnes étaient complètement emballées par le texte.
L’étape suivante fut le casting et on s’est mis d’accord sur le fait qu’on le faisait dans le but du spectacle entièrement monté et non créé pour une nouvelle étape intermédiaire du show case. On a donc auditionné pendant quatre, cinq semaines et on a vu défiler environ huit cents personnes en tout, entre les ensembles et les rôles.
SB : J’ai pu voir le teaser, au niveau des chorégraphies, c’est déjà en place et on voit bien l’énergie du spectacle. On sent ici qu’il y a un propos, une théâtralisation au niveau de la danse, c'est ta vision ?
Ce qu’on veut réussir et on était tous d’accord, c’est le fait qu’on partage le même désir d’une comédie musicale complète où la danse, la musique et le théâtre sont liés et présents dans tous les tableaux…Et non une comédie musicale compartimentée avec des numéros de danses et de chants séparés des scènes de théâtre. Malheureusement, les comédies musicales sont souvent montées en France en compartimentant les postes.
SB : C’est-à-dire ?
C’est comme si on découpait le travail des uns et des autres. Nous, au contraire, nous voulions nous mêler de tout ! Par exemple, sur une scène de théâtre, Romain va également passer pour voir l’espace et la circulation et sur une autre scène plus de danse et de mouvements qu’il va mettre en place, je vais à mon tour être avec lui pour théâtraliser, enlever des choses, épurer et avoir la responsabilité de l’image.
SB : Romain est donc chorégraphe et compositeur, Léa l’a également aidé pour la composition des morceaux, non ?
Ils ont tous deux travaillé ensemble avant que j’arrive, je ne sais donc pas comment ils ont collaboré sur les chansons mais je sais qu’ils ont écrit la plupart de celles-ci ensemble au tout début.
SB : As-tu un budget limité pour créer ta scénographie, peux- tu nous dire les exigences que tu avais en termes de théâtralisation ?
Il y a effectivement le budget pour le show case, qui est sans commune mesure avec celui d’une production complète. Avec Jean Michel Adam, on s’est dit qu’on allait concevoir le décor final et aller jusqu’à la maquette. De ce décor, on va adapter celui du show case qui permettra une mise en scène et une mise en mouvements à moindre coût. Il n’y a donc pas de construction, il y a que des praticables que l’on nous prête et des accessoires, alors que le décor final ressemble à un décor d’opéra. Le but de ce show case est ainsi de donner envie, de donner un avant-goût réel de l’esthétique mais partielle du livret car seulement la moitié de l’histoire sera révélée.
En revanche on verra réellement à quoi cela va ressembler car ce sont les acteurs du spectacle final, la bonne musique, les bons costumes ainsi que la bonne direction d’acteur. Ce n’est pas comme une lecture.
S.B : Merci beaucoup d'avoir pris ce temps pour cet entretien diffusé sur "L'Onde Bleue" et bonne route pour la suite !
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Portrait interview de Benjamin Chesnais, directeur de production
SB : Comment es-tu rentré dans l’aventure ?
J’ai eu connaissance de celle-ci la saison dernière ou j’ai rencontré Alice et Romain. A ce moment-là, je travaillé sur une autre production "Oliver Twist". A l’époque, ils ont organisé ce show case et ils étaient à la recherche d’un producteur. Je connaissais déjà Raphaël avec qui j’ai travaillé sur différents projets quand j’étais administrateur du Hall de la Chanson à La Villette.
SB : C’est donc Raphaël Sanchez qui t’a permis d’entrer dans le projet ? Oui, en me disant qu’il faisait l’orchestration et la direction musicale et qu’ils étaient toujours à la recherche de quelqu’un à la production.
SB : J’ai vu qu’il y a eu une campagne de crowfunding ? Es-tu arrivé avant ou après celle-ci ?
Je suis arrivé après la campagne, il y avait déjà des budgets qui étaient préparés, je les ai juste ajustés en collaboration avec Alice qui a la double casquette de productrice et d’auteure.
SB : Trouves tu que ce projet est novateur ?
C’est vrai que dans la manière de produire le spectacle, on se veut un peu novateur. Notamment en présentant un show case auto financé, d’habitude on présente plutôt une lecture avec une équipe qui change après cette présentation. Or dans notre cas, la particularité, c’est qu’on présente 1h15 de spectacle où les costumes et la scénographie sont faits en parti ainsi que l’orchestration.
SB : Si j’ai bien compris, il y a une maquette décor qui sera présentée dans son ensemble alors qu'une partie déjà réalisée est adaptable au Show case comme pour les autres éléments nécessaires à la production totale du futur spectacle en devenir ?
Effectivement c’est bien ça. Ce côté novateur se retrouve également dans la façon de produire, c’est un peu la jeune génération des producteurs actuels indépendants qui réfléchissent sur un ensemble. Même dans la façon de gérer le personnel, c’est très familial et très professionnel à la fois, tout en essayant de ne pas forcément suivre les sentiers battus.
SB : Ce sont donc des expériences différentes pour chacun et vous essayez ainsi de mutualiser vos compétences pour créer un nouveau genre, une nouvelle forme de production et de réalisation ?
Oui, exactement ! La force d’Alice et de Romain est que malgré leur jeunesse, ils ont chacun leur talent artistique et ils se sont réunis pour monter ce spectacle artistiquement. Ils ont fait le tour des producteurs et ils se sont rendu compte qu’ils voulaient produire eux même le spectacle.
SB : Y a t-il eu une autre campagne financière après le crowfunding qui vous a soutenu ?
Non, ils ont tous deux monté une boite de production, «A tout à l’heure production », Alice étant la présidente.
SB : J’ai pu constater la vision professionnelle large et précise d’Alice. A-t-elle une double formation ?
Alice est normalienne et elle sort de Science Po. Elle est à la fois auteure-artiste et entrepreneuse.
Ce que je trouve très intéressant dans cette façon de travailler pour la production d'un spectacle, c’est qu’ils ont réussi à tout faire seuls car ils ont su où s’arrêtaient leurs compétences. Ils ont su déléguer et s’entourer des bonnes personnes en faisant appel à des professionnels.
SB : D’une même manière, les professionnels apprennent également et peuvent donner une autre vision de ce qu’ils ne peuvent pas faire quand ils sont encadrés dans une grosse production.
Exactement
Propos recueillis par Safia Bouadan
Assistante rédaction Léna Greco
Photographe making-off Julien Vachon
Le reste de l'équipe


Collaboratrice lien avec Assisstante mise en scène
les acteurs


Créatrice costumes Régisseur lumières
Camille Prat Denis Kovansky


Directeur et arrangeur musical Décorateur scénographe
Raphael Sanchez Jean-Michel Adam
Rappel de la distribution artistique :
Equipe de création :
Alice Monicat : auteur, Romain Rachline : compositeur, parolier et chorégraphe, Raphael Sanchez: compositeur, directeur musicale et arrangeur, Emmanuel Suarez: metteur en scène, Jean-Michel Adam: scènographie, Denis Koransky: création lumières, Camille Prat; création costumes, Bruno Segni: création maquillage et coiffures.
Equipe de production:
Alice Monicat, Benjamin Chesnais: directeur de production, Romain Rachline, Edouard Dossetto.
Casting :
Maxime Alvarez de Toledo (Ellis) ; Tatiana Matre (Dalia) ; Sebastien Duchange (Miguel) ; Marianne Millet (Maribel) ; Jaouen Gouevic (José/Pepe) ; Yoann Launay (Boris) ; Magali Bonfils (Sarah) ; Gilles Vajou (Taylor) ; Jonathan Demay (Jefferson) ; Christina Grimandi (la mère)